mercredi 16 mars 2016

Mais où sont passés les genévriers de Fontainebleau ?


Le Genévrier commun (Juniperus communis L.) est une espèce d'arbuste de la famille des Cupressacées. Sa taille peut varier de 4 à 10 mètres de hauteur. Ses feuilles sont des aiguilles persistantes, très piquantes, qui présentent une carène sur la face supérieure et une épaisse bande blanche de stomates sur la face supérieure ce qui permet de le distinguer d'autres espèces de Genévriers (les aiguilles du Genévrier cade ont par exemple deux bandes parallèles plus étroites et les fruits sont plus gros et clairs).


On appelle genièvre une eau-de-vie  proche du gin britannique que l'on parfume comme cette dernière à l'aide de ces baies. Ces dernières entrent aussi dans la composition du gin, du sahti scandinave, du Borovička d'Europe centrale ou de l'aquavit. Les baies de genévrier sont aussi utilisé pour parfumer la choucroute et les pâtés, et entrent dans la recette de certains plats de gibier ou viandes grasses, notamment en raison de leurs propriétés digestives.Mais prudence, un usage abusif du genévrier peut provoquer des troubles rénaux. Il existe aussi une huile essentielle de genévrier réputée pour ses vertus anti-inflammatoire, bactéricide, antivirale, antifongique, mucolytique et drainante. Bref, voilà un arbuste qui gagne a être connu !


Feuilles de Genévrier commun (Juniperus communis L.), Cuvier, Fontainebleau,
(C) 2016 Greg Clouzeau
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L'espèce est commune en France où elle est disséminée de l'étage collinéen à l'étage subalpin, souvent sur des sols très pauvres. Cette espèce pionnière pousse dans les landes sableuses comme sur les sols calcaires. Elle est fréquente sur les stations arides et ensoleillées.. Les grimpeurs qui fréquentent les falaises du sud de la France, en connaissent certaines variétés accrochées en pleine parois et qui servent parfois de relais. Il était semble-t-il très présent en forêt de Fontainebleau ju'squ'au XXe siècle au point de laisser son nom dans divers endroits (notamment
Route du genevrier en FD à hauteur de Veneux les sablons ici)
À compter de la monarchie de juillet, en rapport avec le développement du tourisme, naquit à Fontainebleau un artisanat fondé sur l'usage du genévrier. Est-ce la cause de sa diminution en forêt ? Peut être pas !


En tous cas, on peut lire dans diverses ouvrages que le Genevrier avait autrefois une certaine importance. C'est le cas dans ce livre de l'Administration Forestière de 1792 "Mémoires sur l'administration forestière et sur les qualités individuelles des bois indigènes ou qui sont acclimatés en France. Auxquels on a joint la description des bois exotiques que nous fournit le commerce, Volume 2" et dont provient l'extrait ci dessous (livre ici)




Un peu plus tard, en 1837, Jamin, dans son Guide Quatre promenades dans la forêt de Fontainebleau, ou, Description physique et topographique de cette forêt royale, publié par  H. Rabotin (à lire ici) évoque aussi ces vieux arbres et l'attention qu'on leur porte notamment dans cet extrait.




Source commerciale : 
En effet, son bois très dur et noueux en fait un arbre idéal pour la sculpture des objets vendus comme souvenirs, religieux ou pour fabriquer des brosses et autres nécessaires pour fumeurs. On dit que l'Impératrice était une collectionneuse de ses objets qui se vendaient en grand nombre dans les boutiques à badauds de Fontainebleau.  "L’empereur lui-même, quand il n’est pas pris par un conseil ou une audience dans la salle du Trône, aime se promener à Fontainebleau. Il y fait des achats de souvenirs locaux, des porte-plumes et autres boîtes en genévrier, qu’il distribuera lors de loteries organisées le soir dans ses salons. Il n’oublie pas également de faire le tour des marchands de curiosités de Fontainebleau." 

"Quelquefois on descendait de voiture pour achetant au passage meubles anciens et objets d’art qui viendront enrichir les trésors du château".

(cité dans Fontainebleau sous le Second Empire par Nicolas Personne sur la base du livre souvenir de Madame Octave Feuillet, Quelques années de ma vie, publié chez Calmann-Lévy en 1894 et de Souvenirs sur l’impératrice Eugénie, publié chez Hachette en 1920, par Augustin Filon).




Véritable mode locale dès 1844 et portée par l'afflux de touristes, les boutiques proposants les "genevrines" sont nombreuses à l'image de celle de madame Marchand, commerçante de Fontainebleau qui propose ses petits objets en bois de genévrier. 

Denecourt, le célèbre "inventeur" des sentiers bleus, n'est pas en reste et profite de ce réseau local pour la revente de ces objets et, comme on le voit sur les pages d’informations pratiques de l’édition de  son guide de 1851, il tient aussi commerce chez lui. Sont alors édités de petits albums souvenir de Fontainebleau dont la couverture est faite en genévrier. Ils valent alors entre 6 et 14 francs alors que le salaire journalier d’un ouvrier de l’époque tourne autour de 2 francs. C'est donc un objet dédié à une clientèle assez large de petite et moyenne bourgeoisie. Mais Denecourt a également perçu l’avantage de faire travailler des artistes reconnus, pour des éditions plus luxueuses des albums de lithographies notamment d’Henri Walter, Philippe Benoist, Jacottet ou Nyon jeune.
« Souvenirs de Fontainebleau », écrit et édité par Claude-François Denecourt et couvert en Genévrier a été acquis en 2015 par les Archives départementales lors d’une vente aux enchères. On peut le consulter (ICI)


Mais où donc observer de beaux Genévriers à Fontainebleau ?


Je n'ai pas encore trouver celui-ci, photographié il y a plus de cent ans et que l'auteur estimait agé de 400 ans (Numéro d'inventaire : 0003.00420.34, Auteur(s) : Neurdein Frères, Type de document : vue sur verre, Date : 1900 (vers) Collection : D- Sciences sociales, Description : Positif sur verre
Mesures : hauteur : 85 mm ; largeur : 100 mm Notes : Vue extraite d'une série diffusée par le Musée pédagogique. source)


En revanche, je suis tombé sur celui-là (entre autres) dans les hauteurs du Cuvier est qui est déjà pas mal !
Ces arbustes sont souvent disséminés et de petite taille car poussant sous le couvert des pins. Toutefois, en dehors de quelques très beaux sujets dans le Coquibus et dans les Trois Pignons, la plus belle concentration est à mon gout, celle du Cuvier Châtillon. Dans le site d'escalade du Bas Cuvier, certains vieux sujets servent même à la descente des blocs ! Mais il faut parfois s'éloigner un peu des blocs d'escalade et des sentiers pour en trouver des encore plus vieux et plus gros.


Genévrier commun (Juniperus communis L.), Cuvier, Fontainebleau,
Genévrier commun (Juniperus communis L.), Cuvier, Fontainebleau, (C) 2016 Greg Clouzeau
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Genévrier commun (Juniperus communis L.), Cuvier, Fontainebleau,
Genévrier commun (Juniperus communis L.), Cuvier, Fontainebleau, (C) 2016 Greg Clouzeau


Genévrier commun (Juniperus communis L.), Cuvier, Fontainebleau,
Genévrier commun (Juniperus communis L.), Cuvier, Fontainebleau, (C) 2016 Greg Clouzeau

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