lundi 6 février 2023

[FICHE ESPECE] L'araignée coccinelle (eresus Kollari) un petit trésor de Fontainebleau

Les visiteurs de la Forêt de Fontainebleau et des Trois Pignons sont rarement de grands fans des araignées ! Elles sont pourtant aussi inoffensives qu'utiles et sans elles, nous serions envahis par des insectes de toutes sortes. En général, plus elles sont grosses et velues, plus elles font peur et parmi les nombreuses arachnides que l'on peut observer, celle que je vais présenter ici, a de quoi surprendre au milieu des autres "fiches espèce" de ce blog. Mais que voulez-vous, Fontainebleau est une forêt d'exception à plus d'un titre. Je publie donc à nouveau cette fiche espèce suite à diverses corrections et échanges.

Eresus kollari ou l'Érèse coccinelle Trois Pignons, Fontainebleau, Oct. 2020
Eresus kollari ou l'Érèse coccinelle mâle Trois Pignons, Fontainebleau, Oct. 2020


Eresus kollari ou l'Érèse coccinelle est une araignée paléarctique qui fut appelée par le passé Eresus niger ou Eresus cinnaberinus. Comme toutes les araignées de ce genre, le mâle et la femelle ont des apparences très différentes et si la femelle est difficile à observer, le mâle se reconnaît aisément lors de ses déplacements à la recherche d'une femelle grâce à son abdomen rouge vif orné de quatre taches rondes et noires. La femelle est, elle, presque entièrement noire, à l'exception d'un semis de poils ocrés sur la tête.

C'est une araignée fouisseuse donc qui vit bien cachée et il y a assez peu de chance que vous croisiez sa route en dehors des quelques mâles qui circulent en surface dans certains coins de la forêt car cette espèce est quand même assez rare ici.

Elle vit dans l'écozone paléarctique, l'une des huit régions biogéographiques terrestres. Cette écozone correspond essentiellement aux écorégions terrestres de l'Europe, de l'Afrique du Nord (jusqu'au Sahel septentrional), des deux-tiers nord de l'Asie (jusqu'à l'Himalaya), et du Moyen-Orient (sauf l'Arabie) mais Eresus Kollari est présente surtout en Europe méridionale et centrale et le bassin méditerranéen jusque dans les Alpes du sud entre 600 et 2 000 mètres d'altitude.

Eresus kollari ou l'Érèse coccinelle Mâle, Aout 2015, Réalon, Alt. 2000m
Eresus kollari ou l'Érèse coccinelle Mâle, Aout 2015, Réalon, Alt. 2000m

L'araignée vit dans les terrains sablonneux, secs et chauds, les garrigues caillouteuses, sur les pentes recouvertes de bruyère où la femelle creuse un terrier en forme de tube d'une dizaine de centimètres de profondeur et dont l'entrée est recouverte d'une soie particulière émise par des filières spécialisées (le cribellum). À l'entrée du terrier, la soie s'élargit pour former une sorte de tapis déployé sur le sol qui se termine par des fils de capture. Ce sont généralement des coléoptères qui se font piéger par la toile, mais aussi des mille-pattes ou encore d'autres animaux au sol Cette araignée chasse donc avec ses pattes attrapent ceux qui ont le malheur de passer à proximité de son trou.

La femelle fabrique un cocon pour contenir les œufs et le porte à la surface durant la journée pour le réchauffer. La nuit, elle le cache à nouveau dans son terrier. Le cocon est constitué d'une enveloppe interne, blanc nacré, qui contient les œufs et d'une enveloppe externe, épaisse et plus sombre à laquelle s'accrochent des débris. Les jeunes restent avec leur mère pour une longue période : ils peuvent muer six fois avant de sortir. Si la mère meurt de vieillesse elle peut être mangée par ses enfants. 

Une fois arrivé à maturité, en automne ou au printemps, les mâles quittent leur trou en septembre octobre et se mettent à la recherche d'une femelle qui, elle, reste sédentaire. Les femelles peuvent vivre quatre ans et ne quittent pas leur terrier où a lieu l'accouplement. Les femelles ne mangent pas le mâle.

Si les femelles sont donc quasi invisibles, les mâles sont facilement repérables et identifiables malgré leur petite taille (8 à 11 mm pour le corps et les femelles de 9 à 16 mm). Cette araignée compacte, aux allures de mygale couverte de poils épais jusqu'aux pattes est inoffensives pour l'homme mais de très rares morsures pourraient causer quelques réactions fortes. Laissons - là tranquille et merci de ne pas leur faire de mal.

Le céphalothorax du mâle, légèrement surélevé, est noir avec quelques soies blanches. Le bouclier céphalothoracique rectangulaire et les petits yeux sont caractéristiques de la famille.  L'abdomen est couvert de soies rouge orangé avec deux ou trois paires de taches noires dorsales, parfois cerclées de blanc. Les pattes sont noires avec des anneaux blancs aux articulations. Les pattes III et IV portent des soies rouges. Jusqu'à sa dernière mue, le mâle a la même couleur que la femelle.

Il existe deux espèces de ce genre en France mais l’observation des pièces génitales est indispensable pour une certitude d’identification bien que les colorations soient un peu différentes.

Eresus kollari ou l'Érèse coccinelle Trois Pignons, Fontainebleau, Oct. 2020

Photographier, l'érèsus est assez difficile. Outre le fait qu'il faut déjà la croiser, les mâles courent assez vite. C'est finalement au smartphone que j'ai eu les meilleurs résultats. Croisé une première fois en montagne, nous avons la chance de retrouver ce mâle lors d'une balade dans la Vallée Chaude. Dans le Massif de Fontainebleau, il y a plusieurs colonies dans les environs de la Justice de Larchant et dans la Plaine de Chanfroy. C'est pour ce genre de rencontres qu'il est important de maintenir des milieux ouverts en forêt et que soit conduit régulièrement des chantiers d'arrachage des pins sur les platières comme celui-ci en 2016 qui avait permis la redécouverte de certaines stations d'Eresus.


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